De son diplôme en Manager de programmes internationaux, Humanitaire et Développement à IRIS Sup’, à son poste de chargée de support aux opérations chez ALIMA, Philine Moucheront revient sur son parcours et sur ce qui l’a conduite vers les missions humanitaires. Elle travaille actuellement en République Démocratique du Congo (RDC).
Vous êtes chargée de support aux opérations chez ALIMA, The Alliance for International Medical Action, basée en RDC. Pouvez-vous nous présenter votre ONG et vos principales missions ?
ALIMA est une ONG médicale dont l’objectif est de fournir des soins médicaux de qualité et innovants pour les populations en situation de crise. Elle est spécialisée sur les questions de santé primaire, de malnutrition, la pédiatrie, les violences basées sur le genre et la gestion des épidémies. Son approche se base principalement sur le partenariat, c’est d’ailleurs ce qui m’a particulièrement donné envie de travailler avec elle. L’ONG est aussi très attentive à la qualité des soins pour les patients, à la proximité et à la recherche. ALIMA met en avant le travail d’intelligence collective, et ce, au quotidien, quelles que soient les fonctions occupées : chacun est sollicité dans le cadre des réflexions stratégiques et de la définition des opérations. Le poste que j’occupe actuellement a des frontières à la fois définies et mouvantes, ce qui permet d’apprendre énormément. C’est très stimulant.
En RDC où je travaille actuellement, nous nous occupons principalement de la gestion des épidémies avec l’équipe des urgences. Recrutée initialement en support aux opérations sur la dixième épidémie d’Ebola qui devait se terminer mi-avril, je travaille également sur la pandémie de Covid-19 qui touche le pays. Avec la onzième épidémie d’Ebola déclarée le 1er juin dernier, ma fiche de poste évolue en fonction des besoins.
Concrètement, je suis chargée du suivi des opérations d’urgence, en faisant la liaison entre les bases opérationnelles, les équipes-projet, la coordination et le siège de Dakar. Le suivi est double puisqu’il est réalisé pour les besoins internes à l’ONG, mais aussi pour les bailleurs. En contact avec les équipes médicales, mais aussi les équipes-supports (logisticiens, financiers, ressources humaines, promoteurs de santé…), mon poste offre une vision globale et transversale du fonctionnement d’une mission. Il me permet d’appréhender toutes les réponses à une épidémie dans un contexte d’urgence, les relations avec les bailleurs notamment par le biais des propositions de projets, la recherche de nouveaux contrats de financements, mais aussi la représentation et la communication dans la réponse aux épidémies tant vis-à-vis des autorités sanitaires et politiques, des Nations unies, des ONG, et parfois, des journalistes qui ne peuvent se rendre sur le terrain et ont besoin d’informations.
À quoi ressemble votre journée type ?
C’est compliqué de répondre à cette question. Cela fait plus de six mois que je suis ici et je n’en ai pas vraiment eu. Il y a certes des tâches récurrentes comme la rédaction du projet et son suivi, mais à chaque fois les équipes et les projets sont différents, ce dans diverses provinces de la RDC. Il n’y a pas de « journée type », et c’est pour cela que ce métier est intéressant. IRIS Sup’ nous prépare à cela.
Quelles compétences avez-vous développées en exerçant ce métier ?
Être dans une mission dans un contexte comme la RDC force à développer son adaptabilité. Il faut développer sa réactivité, sa résistance à la fatigue et au stress, d’autant plus dans des conjonctures de Covid-19, où les déplacements des humanitaires sont très réduits. Il faut aussi travailler à la cohésion d’équipe.
Travailler sur une épidémie dans un contexte d’urgence soulève un nombre d’enjeux très riches, notamment au niveau de la santé publique, qu’ils soient politiques, économiques et sociaux. La population congolaise est affectée par un ensemble de crises qui se superposent et s’entrecroisent depuis plusieurs années. Répondre à une nouvelle épidémie dans ces régions demande d’analyser ces contextes complexes. La situation évolue chaque jour, rien n’est jamais acquis. Il s’agit donc d’être très rapide pour produire et rendre compte de ces analyses, et ainsi répondre aux besoins. Ce poste permet ainsi de développer ses compétences en gestion de projets sur l’ensemble de son cycle. Il fait également appel à des compétences en logistique, en finance, en WASH (gestion de l’eau, assainissement, hygiène), etc. J’apprends par ailleurs beaucoup sur la gestion d’un centre de traitement Ebola et de Covid-19, mais aussi sur la gestion des mécanismes de financement et la relation avec les bailleurs. Enfin, ce poste permet d’appréhender le fonctionnement d’une mission, les rôles et responsabilités de chacun, la gestion d’une équipe en période de confinement. Les acteurs sont multiples, il faut donc aussi apprendre à les connaître qu’ils s’agissent des autorités du pays, des Nations unies, des autres ONG, etc.
Vous avez suivi la formation Bac+5 d’IRIS Sup’ Manager de programmes internationaux – Humanitaire et Développement dont vous avez été major de promo. Pourquoi ce choix ? Que vous a-t-elle apporté notamment dans l’exercice de vos fonctions actuelles ?
J’ai eu la chance de savoir ce que je voulais faire très tôt. Cela m’a permis de rapidement comprendre qu’après la prépa que j’avais suivie, même si j’avais des connaissances générales en sciences politiques, il fallait vraiment que j’approfondisse mes connaissances en relations internationales. IRIS Sup’ m’a permis de prendre l’habitude de préparer une grille de lecture et les questions à se poser pour l’analyse d’un contexte. Il est essentiel pour un humanitaire d’analyser rapidement les besoins de manière précise et fine, même s’il connaît peu à la base le terrain d’intervention. Les relations internationales évoluent extrêmement vite, on ne peut jamais être tout à fait à la page au quotidien. Mais on peut avoir une « boîte à outils » pour se poser les bonnes questions au bon moment permettant de produire des analyses pertinentes pour répondre aux besoins des populations. C’est cette « boîte à outils » qu’IRIS Sup’ m’a apportée. Elle m’a aussi permis d’améliorer ma capacité d’analyse, de synthèse, et mes compétences rédactionnelles.
Les chargés de support aux opérations chez ALIMA reçoivent une quantité importante d’informations très techniques, venant d’autres collègues et de personnes occupant des métiers différents. Il faut être capable d’en faire la synthèse pour les rendre intelligibles auprès des membres de l’organisation ou de nos bailleurs. Il faut aussi savoir développer ses idées à l’écrit comme à l’oral. IRIS Sup’ nous forme à cela.
IRIS Sup’ permet par ailleurs de développer son réseau que ce soit avec les enseignants issus du monde de l’humanitaire, via les stages ou encore les amis d’IRIS Sup’ qui deviennent des collègues. Le monde de l’humanitaire est un petit milieu, et le réseau est essentiel.
On y apprend aussi à travailler en équipe, avec des cultures très différentes, l’adaptabilité aux différentes personnalités et à se connaître soi-même pour découvrir quelle place occuper au sein d’une équipe, ce qui est essentiel avant d’arriver dans une mission.
Cette formation est ainsi très complète, car elle nous procure des apports autant théoriques, pratiques que professionnels, et c’est ce qui nous est demandé en arrivant sur place, dans le type de poste que j’occupe actuellement.
Quels souvenirs gardez-vous de vos années IRIS Sup’ ?
Le premier, ce serait la cohésion dans la promotion et les rencontres que j’ai pu faire. On a gardé un bon contact entre nous, avec certains professeurs également. Des amis deviennent des collègues, ce qui est précieux, tant personnellement que professionnellement. On s’échange des opportunités, ce que l’on fait dans nos postes. La deuxième chose ce serait toutes ces connaissances apprises à IRIS Sup’ qui nous servent au quotidien dans nos postes. Cela nous permet d’avoir confiance lorsqu’on arrive dans ces contextes d’urgence qui ne sont pas évidents, en aidant au mieux les organisations.
Quels conseils donneriez-vous aux étudiants d’IRIS Sup’ ?
Le premier conseil serait de bien choisir son stage en fonction de ce qui nous plaît. Chaque fois, mes anciens managers avaient toujours un lien avec le manager actuel. Cela nous arme pour la suite, nous permet de rencontrer et d’affiner notre projet professionnel en découvrant les différents postes. Je conseillerai également de bien choisir son sujet de mémoire, prendre quelque chose qui nous plaît, nous anime et nous inspire. Cela nous permet, encore une fois, de rencontrer des gens et cela peut servir pour les recrutements par la suite. Il faut essayer de créer une cohérence entre nos goûts et notre personnalité, qui nous confère un certain fil conducteur, nous permettant de savoir ce qui nous intéresse vraiment et d’être épanouis.
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